COCA MARIANI | Decision 2700220

OPPOSITION n° B 2 700 220

The Coca-Cola Company, One Coca-Cola Plaza, Atlanta, Georgia, 30313 Etats-Unis d’Amérique (opposante), représentée par Hoyng Rokh Monegier Spain LLP, Calle Ruiz de Alarcón, 7-2º Dcha, 28014 Madrid, Espagne (mandataire agréé)

c o n t r e

Christophe Mariani, Chemin Ranuchietto BP 5286, 20167 Mezzavia, France (demandeur).

Le 26/05/2017, la division d’opposition rend la présente

DÉCISION:

1.        L’opposition n° B 2 700 220 est accueillie pour tous les produits contestés.

2.        La demande de marque de l’Union européenne n° 15 080 931 est rejetée dans son intégralité.

3.        Le demandeur supporte les frais, fixés à 620 EUR.

MOTIFS:

L’opposante a formé une opposition à l’encontre de tous les produits visés par la demande de marque de l’Union européenne n° 15 080 931, compris dans les classes 5, 32 et 33. L’opposition est fondée sur, notamment, l’enregistrement de l’Union européenne n° 2 091 569. L’opposante a invoqué l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE et l’article 8, paragraphe 5, du RMUE.

RENOMMÉE – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 5, DU RMUE

Pour des raisons d’économie de procédure, la division d’opposition examinera en premier lieu l’opposition fondée sur la marque antérieure de l’Union européenne n° 2 091 569 « Coca-Cola », au titre de laquelle l'opposante prétend jouir d’une renommée dans l’Union européenne.

Conformément à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, sur opposition de la titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque contestée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d'une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

Il résulte de ce qui précède que les motifs de refus prévus à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE ne sont applicables que si les conditions suivantes sont remplies :

  • les signes doivent être identiques ou similaires ;

  • la marque de l’opposante doit être renommée. La renommée doit également être antérieure au dépôt de la marque contestée ; elle doit exister dans le territoire concerné et pour les produits et/ou services pour lesquels l’opposition a été formée ;

  • risque de préjudice : l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice.

Les conditions susvisées sont cumulatives et l’absence de l’une d’elles entraîne donc le rejet de l’opposition au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE (16/12/2010, T-345/08, et T-357/08, Botolist / Botocyl, EU:T:2010:529, § 41). Il y a lieu de noter, toutefois, que le fait que toutes les conditions susvisées soient remplies peut ne pas suffire. En effet, l’opposition peut encore être rejetée si le demandeur démontre un juste motif pour l’usage de la marque contestée.

En l’espèce, le demandeur n’a pas invoqué un juste motif pour utiliser la marque contestée. Dès lors, en l’absence de toute indication contraire, il convient de supposer qu’il n’existe pas de juste motif.

  1. Renommée de la marque antérieure

Aux dires de l’opposante, la marque antérieure est renommée dans l’Union européenne.

La renommée implique un seuil de connaissance qui n’est atteint que lorsque la marque antérieure est connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou services qu’elle désigne. Le public au sein duquel la marque antérieure doit avoir acquis une renommée est celui concerné par cette marque, c’est-à-dire selon le produit ou service commercialisé, le grand public ou un public plus spécialisé.

Dans le cas présent, la marque contestée a été déposée le 05/02/2016. Par conséquent, l’opposante a été invitée à apporter la preuve que la marque antérieure a acquis une renommée dans l’Union européenne avant cette date. Par ailleurs, les preuves doivent établir que la renommée a été acquise pour les produits par rapport auxquels la renommée a été invoquée par l’opposante, à savoir :

Classe 32: Bières; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques; boissons de fruits et jus de fruits; sirops et autres préparations pour faire des boissons.

Afin de déterminer le niveau de renommée de la marque, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir.

Le 22/11/2006, l’opposante a présenté, notamment, les preuves suivantes :

  • Annexe n°1: Classement des « Best Global Brands » (« Meilleures marques du monde »), élaboré par Interbrand. De 2013 à 2016, la marque « COCA-COLA » arrive en troisième position du classement et de 2004 à 2012, elle est en tête du classement. Pour l’année 2015, sa valeur est estimée à USD 78 423 millions.

  • Annexe n°2: Article daté du 21/01/2015, paru dans le quotidien The Daily Meal (www.thedailymeal.com) intitulé « 10 facts you didn’t know about Coca-Cola » et sa traduction en français (« 10 choses que vous ne saviez pas sur Coca-cola ») qui explique que Coca-Cola, qui a été servi pour la première fois en 1866, représente aujourd’hui plus de 40% de la part de marché des sodas.

  • Annexe n°3: Article paru dans le numéro d’hiver 2015-2016 de la revue CMA CGM (www.cma-cqm.com) intitulé « Coca-Cola : Meeting with global giant » et sa traduction partielle en français (« Coca-Cola : Réunion avec un géant global ») qui explique qu’en tant que marque la plus connue au monde « Coca-Cola » est le deuxième mot le plus largement compris, après « OK », à travers 5 continents. Coca-Cola est le producteur mondial No 1 de boissons non-alcoolisées et l’un des principaux géants de l’économie internationale. « Coca-Cola » est servi 1,8 milliards de fois par jour dans plus de 200 pays. 

  • Annexe n°4: Article daté du 11/09/2012, paru dans BBC News (www.bbc.com) intitulé « Who, What, Why: In which countries is Coca-Coca not sold ? » et sa traduction partielle en français (« Qui, Quoi, Pourquoi: Dans quel pays on ne vend pas de Coca-Cola ?» qui explique qu’après près de 60 ans, « Coca-Cola » est en vente à nouveau en Birmanie et qu’elle est l’une des marques les plus reconnues au monde.

  • Annexe n°5: Document extrait du site web http://fr.fifamuseum.com/ qui affirme que « COCA-COLA » a participé comme sponsor à Ia coupe du monde de football depuis 1978.

  •  Annexe n°6: Article du 02/10/2012, paru dans PuroMarketing sur le site www.deseos-originales.com et sa traduction partielle en français qui explique que « Coca-Cola » maintient son leadership comme la marque la plus valorisée au monde et elle a augmenté de 8% sa valeur par rapport à l’année antérieure pour atteindre 77.839 millions de dollars.

  •  Annexe n°7: Article paru sur le site www.les-absolutecom le 19/10/2015 intitulé « Coca-Cola, la marque experte en bonheur », qui explique que Ia marque « COCA-COLA » associe son produit à l’idée du bonheur dans ses campagnes de marketing.

  • Annexe n°8: Article paru dans le quotidien Le Figaro (http://blog.lefigaro.fr) du 11/02/2014 intitulé « Coca-Cola, Samsung, Kinder, Microsoft et Kiabi: champions de Facebook en France » qui explique qu’il y a près de 3,5 millions de fans français pour Ia page « Coca Cola ».

  • Annexe n°9: Article paru dans le quotidien Le Parisien (www.leparisien.fr) le 25/01/2016, intitulé «Coca-Cola fait le pari d’une année pétillante » qui explique que « COCA-COLA », le numéro un mondial de Ia boisson va désormais communiquer autour d’une marque unique et prépare l’Euro 2016, qui se déroulera en France en juin et dont il est le partenaire majeur.

  • Annexe n°10: Article paru sur le site http://www.chartsinfrance.net le 21/01/2016 intitulé « Musique de Ia pub Coca Cola “Savoure l’instant”: qui chante ? » qui fait référence à Ia nouvelle stratégie de marketing de « COCA-COLA » qui a misé sur des valeurs sûres: l’amitié, l’amour, le bien-être.

  • Annexes n°11-14 : Copies de décisions de la division d’opposition et des Chambres de Recours datées entre 2012 et 2015, reconnaissant la renommée de la marque « Coca-Cola » pour des boissons gazeuses non alcooliques en classe 32.

Il ressort clairement des preuves produites que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage long et intensif et qu’elle est généralement connue sur le marché pertinent, où elle occupe une position solide parmi les marques leaders du marché, comme en attestent diverses sources indépendantes. De 2004 à 2012, la marque « Coca-Cola » est la marque la plus valorisée au monde et de 2013 à 2016, elle arrive en troisième position du classement Interbrands; sa valeur ayant été estimée à USD 78 423 millions en 2015. En outre, les diverses références dans la presse au succès de la marque constituent autant de circonstances établissant sans aucune équivoque que la marque jouit d’un degré élevé de reconnaissance au sein du public pertinent.

Par conséquent, eu égard aux observations qui précèdent, la division d’opposition conclut que la marque antérieure est renommée dans l’Union européenne pour les boissons gazeuses non alcooliques en classe 32.

  1. Les signes

Coca-Cola

COCA MARIANI

Marque antérieure

Marque contestée

Le territoire pertinent est l’Union européenne.

L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (11/11/1997, C-251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23).

La marque antérieure est la marque verbale « Coca-Cola ». Prise dans son ensemble, elle n’a pas de signification. Toutefois, le terme « COCA » désigne dans certaines langues de l’Union européenne comme l’anglais, l’espagnol, le roumain et le français une plante d’Amérique du sud, cultivée pour ses feuilles dont on extrait la cocaïne et par métonymie, la substance extraite des feuilles de cet arbuste. En espagnol, ce terme désigne également un type de gâteau. Pour une partie du public, cet élément pourra ainsi être perçu comme faisant allusion à la plante de coca dans la mesure où les produits sont des boissons gazeuses non alcooliques pouvant contenir des extraits de feuilles de coca. Le caractère de cet élément est par conséquent intrinsèquement faible pour une partie du public. Pour une partie du public, il possède cependant un caractère distinctif intrinsèque normal. Par exemple, pour le public lituanien, cet élément n’a pas de signification (le terme équivalent est « kokos ») et pour le public hongrois « coca » désigne un petit cochon (le nom de la plante est « kokacserje ») et par conséquent, ce terme n’a aucune signification en relation avec les produits concernés.

Pour une large partie du public, le terme « COLA » de la marque antérieure est le nom générique de boissons gazeuses préparées à partir d’extraits naturels de fruits ou de plantes et contenant, en plus du gaz carbonique, du sucre ou des succédanés de sucre, de la caféine et des colorants. En relation avec les produits concernés en classe 32, ce terme est donc dépourvu de caractère distinctif étant donné qu’il décrit un type de boissons ou leur ingrédient/goût.

La marque contestée est une marque verbale composée des termes « COCA MARIANI ». Pour une partie du public, « COCA » possède la signification ci-dessus mentionnée. « MARIANI » sera perçu comme un nom de famille. Etant donné que cet élément ne possède pas de caractère descriptif, allusif ou tout autre caractère faible pour les produits en cause, il est distinctif.

Etant donné que les signes en présence sont des marques verbales, ils sont protégés aussi bien pour une écriture en lettres majuscules que minuscules ou une combinaison des deux.

Sur le plan visuel, les signes coïncident au niveau de l’élément « COCA » placé au début des signes. A cet égard, il convient de signaler que les consommateurs ont généralement tendance à se concentrer sur le début d’un signe lorsqu’ils sont confrontés à une marque. Cette tendance s’explique par le fait que le public lit de gauche à droite, ce qui fait que la partie placée à la gauche du signe (la partie initiale) est celle qui attire en premier lieu l’attention du lecteur. Les signes diffèrent au niveau des éléments « COLA » contre « MARIANI » et du trait d’union placé entre les deux éléments verbaux de la marque antérieure. Etant donné les considérations précédentes concernant la distinctivité de l’élément commun « COCA » et sa position, il est conclu que les signes présentent un degré de similitude visuelle qui varie de faible à moyen, selon la partie du public considérée.

Sur le plan phonétique, indépendamment des différentes règles de prononciation dans différentes parties du territoire pertinent, la prononciation des signes coïncide par les syllabes /co-ca/, présentes de façon identique dans les deux signes. La prononciation diffère par le son des éléments « COLA » et « MARIANI ». Etant donné les considérations précédentes concernant la distinctivité de l’élément commun « COCA » et sa position, il est conclu que les signes présentent un degré de similitude phonétique qui varie de faible à moyen, selon la partie du public considérée.

Sur le plan conceptuel, il est fait référence aux affirmations précédentes concernant le contenu sémantique des marques. Pour une partie du public (celle qui comprendra l’élément commun « COCA »), les signes sont conceptuellement similaires à un faible degré. Pour la partie du public qui ne comprendra pas l’élément commun « COCA » mais percevra la signification des éléments « COLA » et/ou « MARIANI », les signes ne sont pas similaires sur le plan conceptuel.

Compte tenu des coïncidences visuelles, phonétiques et, pour une partie du public, conceptuelles, résultant de l’élément commun « COCA » placé au début des signes, les signes en présence présentent des similitudes.

  1. Le «lien» entre les signes

Comme indiqué ci-dessus, la marque antérieure jouit d'une forte renommée et les signes présentent un certain degré de similitude. Afin d'établir l’existence d’un risque de préjudice, il est nécessaire de démontrer que, compte tenu de tous les facteurs pertinents, le public concerné établira un lien (ou une association) entre les signes. La nécessité d'un tel «lien» entre les marques en conflit dans l'esprit des consommateurs n'est pas explicitement prévue par l'article 8(5) RMUE mais elle a été confirmée par l’arrêt du 23/10/2003, C-408/01, Adidas, EU:C:2003:582, § 29 et 31 et par l’arrêt du 27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 66. Il ne s’agit pas d’une exigence supplémentaire: ceci reflète simplement la nécessité de déterminer si l'association que le public pourrait établir entre les signes est telle qu'il est vraisemblable que l'usage de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu'il lui porte préjudice, après avoir apprécié tous les facteurs pertinents dans le cas d'espèce.

Parmi les critères pertinents aux fins d'apprécier s'il existe un «lien», peuvent être cités (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 42):

        le degré de similitude entre les signes ;

        la nature des produits et des services, y compris le degré de similitude ou de dissemblance de ces produits ou services ainsi que le public concerné ;

        l’intensité de la renommée de la marque antérieure ;

        le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure ;

        l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public.

Cette liste n'est pas exhaustive et d'autres critères peuvent être pertinents en fonction des circonstances de l'espèce. De plus, l'existence d'un «lien» peut être établie sur la base de certains de ces critères seulement.

Les signes présentent un degré de similitude visuelle et phonétique qui varie de faible à moyen. Conceptuellement, pour une partie du public, les signes sont similaires à un faible degré. En outre, comme l’a fait valoir l’opposante, en France, « COCA » est « l’abréviation de « COCA-COLA » » défini comme la « boisson gazeuse fabriquée par Coca-Cola Company » (voir dictionnaire Larousse en ligne, www.larousse.fr). Les similitudes entre les signes découlent de l’élément commun « COCA ». Même si cet élément est faible au regard des produits pertinents pour une partie du public (dans la mesure où il est allusif de boissons contenant des feuilles de coca), il est repris de façon identique dans les deux signes à la même position, à savoir au début des signes, dans la partie qui attire le plus l’attention des consommateurs. En outre, pour une partie des consommateurs, il s’agit d’un élément distinctif.

En ce qui concerne les produits concernés, la marque antérieure jouit d’une forte renommée pour les boissons gazeuses non alcooliques en classe 32.

L’opposition est dirigée contre les produits suivants:

Classe 5 : Boissons à usage médicinal; Boissons vitaminées; Produits digestifs; Digestifs à usage pharmaceutique; Préparations pharmaceutiques affectant les organes digestifs.

Classe 32 : Jus de fruits [boissons]; Sirops [boissons sans alcool]; Boisson à l'orange; Cola [boissons sans alcool]; Colas [boissons sans alcool]; Boissons au cola sans alcool; Boissons énergétiques; Boissons énergétiques à usage non médical; Boissons énergétiques contenant de la caféine; Sirops [boissons]; Eaux [boissons]; Boissons isotoniques; Sorbets [boissons]; Boissons énergétiques; Sirops pour boissons; Jus végétaux [boissons]; Eaux minérales [boissons]; Boissons sans alcool; Boissons pour sportifs; Boissons non alcoolisées; Boissons gazeuses aromatisées; Salsepareille [boisson sans alcool]; Boisson à l'orange; Jus de fruits [boissons]; Sirops [boissons sans alcool]; Boissons aromatisées aux fruits; Colas [boissons sans alcool]; Boisson à l'orge citronnée; Boissons granitées en partie congelées; Boissons de fruits sans alcool; Boissons à base de fruits; Préparations pour faire des boissons; Boissons sans alcool non gazéifiées; Boissons à base de bière; Boissons gazeuses congelées sans alcool; Boissons au cola sans alcool; Boissons énergétiques à usage non médical; Boissons énergétiques contenant de la caféine; Apéritifs sans alcool; Sodas; Eau gazeuse [soda]; Bières; Bières blondes; Bières aromatisées; Bières enrichies en minéraux; Bières brunes [bières à base de malt grillé]; Bières à base de froment.

Classe 33 : Boissons alcoolisées de fruits; Vins; Vin; Vins vinés; Vin chaud; Vin blanc; Vin rouge; Amontillado [vin]; Vins pétillants; Vins effervescents; Vins chauds; Vins mousseux; Vins rosés; Vins sucrés; Punch au vin; Vin de cuisine; Vins effervescents naturels; Boissons contenant du vin [spritzers]; Vin de riz traditionnel coréen [makgeoli]; Boisson à base de vin et de jus de fruits; Vins de raisins japonais sucrés aux extraits de ginseng et écorces de quinquina; Boissons énergétiques alcoolisées; Liqueurs toniques aromatisées; Liqueur tonique aromatisée aux extraits d'aiguilles de pin [matsuba-zake]; Boissons distillées; Boissons énergétiques alcoolisées; Boissons alcoolisées comestibles; Boissons alcoolisées de fruits; Boissons à base de rhum; Boissons à base de vin; Boissons alcoolisées contenant des fruits; Extraits alcooliques; Essences alcooliques; Apéritifs à base de vin; Apéritifs à base de liqueurs; Apéritifs; Bitters apéritifs alcoolisés; Apéritifs à base de liqueurs distillées; Digestifs [alcools et liqueurs]; Liqueurs; Anis [liqueur]; Liqueurs toniques aromatisées; Liqueurs de plantes; Boissons gazeuses alcoolisées autres que bières; Boissons alcoolisées (à l'exception des bières); Boissons alcoolisées à l'exception des bières; Vin; Vins; Vins vinés; Vin chaud; Vin blanc; Vin rouge; Vins pétillants; Vins effervescents; Vins chauds; Vins mousseux; Vins rosés; Vins sucrés; Punch au vin; Vin de cuisine; Boissons contenant du vin [spritzers]; Vin à faible teneur en alcool; Cocktails préparés à base de vin; Vin de framboises noires [Bokbunjaju].

L'établissement d'un lien, bien que déclenché par la similitude (ou l'identité) des signes, exige que les publics concernés par chacun des produits visés par les marques en conflit soient les mêmes ou se chevauchent dans une certaine mesure.

En l’espèce, les produits en classe 32 couvrent des boissons non alcooliques et des préparations pour faire des boissons qui sont identiques ou similaires aux produits de la marque antérieure pour lesquels la renommée a été établie. Les produits en classe 33 désignent essentiellement des boissons alcooliques qui sont similaires à un faible degré aux boissons gazeuses non alcooliques de la marque antérieure dans la mesure où ces produits s’adressent au même public et peuvent être concurrents. En ce qui concerne les essences et extraits alcooliques en classe 33, il n’existe pas de différence suffisamment forte entre ces produits et les boissons gazeuses non alcooliques de l’opposante de nature à exclure un lien. En effet, les extraits et essences alcooliques peuvent être mélangés à des boissons non alcooliques pour former par exemple des cocktails. Ces produits font partie de marchés assez proches (le marché des boissons). En ce qui concerne les produits contestés en classe 5, ils couvrent des boissons ou des produits qui peuvent être vendus sous forme de boissons. Même si ces derniers sont à usage médical et pharmaceutique (boissons vitaminées, digestives, etc.), ils présentent une certaine proximité avec les produits antérieurs. En effet, ces produits s’adressent au même public et ils peuvent être en concurrence dans la mesure où il est généralement considéré que les boissons gazeuses non alcooliques, pour lesquelles la marque antérieure est réputée, ont des vertus en termes de santé. En effet, comme l’a fait valoir l’opposante, les produits de la marque antérieure peuvent également être consommés en cas de troubles intestinaux et digestifs.

En conséquence, eu égard à l’ensemble des facteurs pertinents du cas d'espèce et après appréciation de ces derniers, la division d'opposition conclut que lorsqu'ils rencontreront la marque demandée sur les produits contestés ci-dessus énumérés, les consommateurs concernés l'associeront vraisemblablement au signe antérieur, c'est-à-dire établiront un «lien» mental entre les signes. Toutefois, bien qu'un «lien» entre les signes soit une condition nécessaire pour poursuivre l'appréciation du risque que l'usage de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu'il leur porte préjudice, l'existence d'un tel lien ne saurait toutefois suffire, à elle seule, à conclure à l’existence de l’un des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE (26/09/2012, T-301/09, Citigate, EU:T:2012:473, § 96).

  1. Risque de préjudice

L’usage de la marque contestée relève de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE lorsqu’une ou plusieurs des situations suivantes surviennent :

  • la marque contestée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ;

  • la marque contestée porte préjudice à la renommée de la marque antérieure

  • la marque contestée porte préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure.

Bien que le préjudice ou le profit indu puisse n’être que potentiel dans une procédure d’opposition, une simple possibilité ne suffit pas pour que l’article 8, paragraphe 5, du RMUE s’applique. Alors que la titulaire de la marque antérieure n’est pas tenue de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque, elle doit «apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice» (06/07/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 53).

Il s’ensuit que l’opposante doit établir que le préjudice ou le profit indu est probable en ce sens qu’il est prévisible dans des circonstances normales. À cet effet, l’opposante doit apporter des preuves ou, à tout le moins, avancer une argumentation cohérente montrant en quoi consisterait et comment surviendrait le préjudice ou le profit indu qui pourrait conduire à conclure prima facie qu’un tel événement est effectivement probable dans des circonstances normales.

L’opposante allègue que l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure et porterait préjudice au caractère distinctif et à la renommée de la marque antérieure.

Profit indu (parasitisme)

Dans le contexte de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, la notion de profit indu englobe les cas où il y a exploitation et «parasitisme» manifestes d’une marque célèbre ou une tentative de tirer profit de sa réputation. En d’autres termes, il s’agit du risque que l’image de la marque renommée ou les caractéristiques projetées par cette dernière soient transférées aux produits et services désignés par la marque contestée, de sorte que leur commercialisation serait facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée (06/07/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 48, et 22/03/2007, T-215/03, Vips, EU:T:2007:93, § 40).

L’opposante fonde notamment son moyen sur le fait que la marque antérieure jouit d’une renommée indubitable, ayant été reconnue durant plusieurs années comme la marque la plus connue au monde. Elle fait valoir qu’il existe un lien entre les signes du fait de leurs similarités et de la proximité des produits, tous liés à différents types de boissons s’adressant au même public. Par conséquent, elle considère que l’usage de la marque contestée tirera indûment profit de la renommée et du pouvoir de vente de la marque antérieure. L’opposante fait valoir que le demandeur bénéficiera du succès et de la réputation de la marque antérieure qui est associée à des valeurs positives comme l’authenticité, la jouissance des choses simples et le bonheur. Il pourra ainsi introduire sa marque sans encourir un grand risque et les frais liés à l’introduction sur le marché d’une marque inconnue.

Selon la Cour de Justice de l’Union européenne, … s’agissant de l’atteinte constituée par le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, dans la mesure où ce qui est prohibé est l’avantage tiré de cette marque par la titulaire de la marque postérieure, l’existence de ladite atteinte doit être appréciée dans le chef du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels la marque postérieure est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 36.)

En l’espèce les produits contestés s’adressent au grand public, tout comme les produits de la marque antérieure pour lesquels la renommée a été prouvée. Par conséquent, les publics concernés par les produits des marques en conflit sont les mêmes.

Le Tribunal a établi que plus le caractère distinctif et la renommée de la marque antérieure sont importants, plus l’existence d’une atteinte à la marque antérieure renommée peut aisément être admise (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 44; 25/05/2005, T-67/04, Spa-Finders, EU:T:2005:179, § 41).

Le Tribunal a également formulé que plus l’évocation de la marque antérieure par la marque demandée est immédiate et forte, plus le risque que l’utilisation actuelle ou future de la marque demandée tire un profit indu du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure sera aisément admis (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 67).

Le Tribunal a même admis qu’il est possible, notamment dans le cas d’une opposition fondée sur une marque bénéficiant d’une renommée exceptionnellement élevée, que la probabilité d’un risque futur non hypothétique de profit indûment tiré par la marque demandée soit tellement évidente que l’opposante n’a pas besoin d’invoquer et de prouver aucun autre élément factuel à cette fin. Il n’est, dès lors, pas exclu qu’une renommée extrêmement élevée puisse constituer, exceptionnellement, en soi, un indice du risque futur non hypothétique de profit indûment tiré par la marque demandée en tant que telle par rapport à chacun des produits et services qui ne sont pas semblables à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée. (02/10/2015, T-625/13, Darjeeling, EU:T:2015:742, § 134, 139).

En l’espèce, la marque antérieure jouit d’une forte renommée étant donné qu’il s’agit d’une des marques les plus valorisées au monde (la première de 2004 à 2012 et la troisième de 2013 à 2016). Les campagnes publicitaires ont démontré qu’elle est associée à des valeurs positives telles que le bonheur, l’amitié, l’amour, le bien-être. Etant donné la proximité des produits et de leurs marchés, ces valeurs peuvent aisément être transférées aux produits commercialisés sous la marque contestée. Ce transfert d’image permettrait au demandeur d’introduire sa marque sur le marché sans d’exposer à des risques importants et sans devoir supporter les coûts de lancement, notamment publicitaires, d’une marque nouvellement crée.

Ainsi, la division d’opposition considère que le pouvoir d’attraction de la marque antérieure, son prestige et sa forte valeur commerciale peuvent être transférés aux produits désignés par le signe contesté, de sorte que leur commercialisation serait facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée.

Eu égard aux observations qui précèdent, la division d’opposition conclut que l’usage de la marque contestée est susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure.

Autres types de risque de préjudice

L’opposante soutient également que l’usage de la marque contestée porterait préjudice au caractère distinctif et à la renommée de la marque antérieure.

Comme indiqué plus haut, l’existence d’un risque de préjudice est une condition essentielle d’application de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE qui peut revêtir trois types différents. Pour qu’une opposition soit bien fondée, il suffit à cet égard qu’un seul de ces trois types soit présent. Comme mentionné plus haut, en l’espèce, la division d’opposition a déjà conclu que la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’examiner si d’autres types s’appliquent également.

  1. Conclusion

Eu égard aux observations qui précèdent, l’opposition est bien fondée au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE. La marque contestée doit dès lors être rejetée pour l’ensemble des produits contestés.

Dans la mesure où l’opposition est accueillie dans son intégralité au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, il n’est pas nécessaire d’examiner l’opposition sur la base de l’autre motif et de l’autre droit antérieur invoqués.

FRAIS

Conformément à l’article 85, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’opposition supporte les frais et taxes exposés par l’autre partie.

Le demandeur étant la partie perdante, il doit supporter la taxe d’opposition ainsi que les frais exposés par l’opposante aux fins de la présente procédure.

Conformément à la règle 94, paragraphes 3 et 6 et à la règle 94, paragraphe 7, point d), sous i), du REMUE, les frais à rembourser à l’opposante sont la taxe d’opposition et les frais de représentation dont le montant est fixé dans la limite du taux maximal déterminé dans le REMUE.

La division d’opposition

Catherine MEDINA

Frédérique SULPICE

Begoña URIARTE VALIENTE

Conformément à l’article 59 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 60 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.

Le montant déterminé lors de la répartition des frais ne peut être révisé que par une décision de la division d’opposition, sur requête. Conformément à la règle 94, paragraphe 4, du REMUE, la requête doit être présentée dans le délai d’un mois après la notification de la répartition des frais et n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de réexamen de 100 EUR (annexe I A, paragraphe 33, du RMUE).

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